Faut-il encore présenter Jean-Philippe Lanouguère ? Membre de l’Académie culinaire de France, double champion du monde, détenteur des titres les plus prestigieux, il est l’un des derniers maîtres vinaigriers de France. Un métier rare donc, qu’il tente de promouvoir auprès des écoles. Rencontre avec un authentique passionné.
Jean-Philippe Lanouguère est tombé dans le vinaigre il y a 16 ans. Ancien directeur d’exploitation d’une entreprise de nettoyage, le futur maître vinaigrier décide de tout plaquer pour se consacrer à sa passion : la fermentation, puis le vinaigre. Il fabrique aujourd’hui pas moins de 49 références pour des chefs venus de tous horizons, 11 pour des producteurs, et il gère également deux vinaigreries, l’une à Bordeaux et l’autre à Socoa, au sein de l’entreprise de vinification sous-marine Egiategia.
« Il ne reste plus que 6 vinaigriers en France qui pratiquent ce que l’on appelle la méthode d’Orléans »
, explique Jean-Philippe Lanouguère. Il s’agit d’une fermentation naturelle en surface, sans agitation du liquide ni ajout de ferments ou d’accélérateurs d’oxydation. S’il est possible aujourd’hui de fabriquer du vinaigre en quelques heures grâce aux machines, le maître vinaigrier met plus d’un an à fabriquer le sien. C’est ce qui explique sans doute la raison pour laquelle ce métier, devenu incompatible avec une logique de rendement, se fait si rare.
Les usages du vinaigre au fil des siècles
Impossible de parler de vinaigre sans évoquer son berceau d’origine, Orléans. La ville doit son titre de « capitale du vinaigre » à la Loire qui transportait les marchandises, dont le vin, depuis Chinon, la Bourgogne ou même l’Auvergne vers Paris. « Au départ, le vinaigre était une boisson, puis c’est devenu un médicament », précise Jean-Philippe Lanouguère. Les vinaigriers, que l’on appelait apothicaires, prêtaient en effet serment à la cour du roi. Ce n’est qu’après que le vinaigre est devenu un conservateur et un condiment. À l’époque, il existait un impôt sur le sel servant à la conservation des aliments, mais l’argent manquait. Alors, pour contourner cet impôt, le peuple s’est mis à conserver la nourriture au vinaigre.
Au sein de sa vinaigrerie sise à Mauléon, le maître vinaigrier fait fermenter du vinaigre à la ruta, au gingembre ou au cœur de dragon : « nous avons la chance d’avoir la plus belle région du monde dans laquelle l’on trouve de tout ! », s’enthousiasme l’Académicien. Jean-Philippe Lanouguère propose également des vinaigres au sureau, à l’ail des ours, à la vanille, aux échalotes ou encore aux graines de coriandre. Et comme si cela ne suffisait pas, il fabrique également des moutardes et prépare des légumes au vinaigre : « il y a 100 variétés de piments, tout vient d’ici, c’est seulement à 15 km de chez moi. » Son espace de travail, c’est la barrique : « une fois qu’elle est fermentée, je la transvase et je fais un affinage de 4 ans puis, une fois affiné, je procède à la mise en bouteille. » Les barriques les plus anciennes ont 16 ans, les plus récentes 2 ou 3 mois.
Jean-Philippe Lanouguère se rend dans les écoles pour expliquer son métier qu’il tente de promouvoir auprès des jeunes générations. Il intervient dans de prestigieuses écoles de cuisine, à l’instar de l’institut Paul Bocuse, mais également auprès des CFA. Il organise également un repas chaque année, le 16 août, au sein même de la vinaigrerie, préparé par des chefs reconnus. C’est libre et ouvert à tous, et le tarif est de 10€. Les sommes récoltées sont intégralement reversées à des associations.
Envie de vous laisser tenter par les vinaigres de Jean-Philippe Lanouguère ? Rendez-vous au sein de la vinaigrerie à Mauléon ou sur le Site web !
Jean-Philippe Lanouguère propose une formation gratuite de 8 jours, logement compris. Attention, le double champion du monde s’octroie le choix de sélectionner avec soin ses futurs apprenants ! Enfin, s’il avait un seul conseil à donner à celles et ceux qui seraient tentés par le métier de vinaigrier, ce serait sans doute celui-ci : « c’est un métier passionnant pour passionnés. On ne gagne pas beaucoup d’argent, mais on acquiert une autre forme de richesse. »
À bon entendeur !
Vinaigrerie Saint-Jacques
6, rue Ramuntcho, Mauléon-Licharre
Tél. 06 16 54 22 83
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